Conduction du potentiel d'action

Dans un câble électrique, un courant peut passer d'un point à un autre, lorsqu'existe entre ces points une tension. Le fil électrique possédant une faible résistance interne (peu de pertes), une impulsion électrique peut être acheminée par un tel câble sur de longues distances. La fibre nerveuse a une résistance interne bien plus grande. La conduction locale le long de cette fibre (conduction électrotonique) s'atténue rapidement dans ce cas. Avant que cela ne se produise, l'impulsion transmise doit donc être régénérée par une constante reformation du potentiel d'action.

Dans le détail, ceci se produit de la manière suivante : lors du déclenchement d'un PA unique, il se produit une très brève entrée de Na+ [courant entrant de Na+). De ce fait, se produit un courant ionique vers l'intérieur de la cellule nerveuse. La membrane cellulaire, précédemment chargée positivement à l'extérieur (potentiel de repos) voit sa charge changer de signe (l'extérieur devenant alors négatif). Cette inversion de charge par rapport aux segments membranaires voisins entraîne, le long de la fibre (à l'intérieur comme à l'extérieur) une égalisation des charges, c'est-à-dire un courant électrique; la soustraction de charge provoque à proximité une dépolarisation. Si le potentiel critique (potentiel seuil) est atteint, il se produit alors localement un nouveau PA, alors que le précédent est en voie d'extinction.

L'entrée du Na+ lors de la création du PA entraîne tout d'abord, dans la partie proximale de l'axone, une décharge de la membrane (décharge capacitaire de la membrane équivalant à un condensateur). Afin de rééquilibrer la charge, un courant électrique capacitaire va s'instaurer [il sera ici dépolarisant), courant qui avec l'éloignement : a) s'affaiblira ; b) s'établira moins rapidement (montée moins rapide). Si le potentiel seuil n'est pas atteint (et aucun potentiel d'action n'est déclenché) on observe une augmentation du courant de K+ (repolarisation), dirigé vers l'extérieur, puisque le potentiel d'équilibre de la membrane n'est pas différent du potentiel d'équilibre du K+, EK. De ce fait, il se produit une augmentation du potentiel activant pour K+. Un nouveau potentiel ne pourra être déclenché, à distance du précédent que si le courant capacitaire est suffisant pour provoquer une dépolarisation supra liminaire. A une distance plus éloignée : a) l'amplitude de la dépolarisation est trop faible et surtout : b) la pente ascendante de cette dépolarisation n'est pas assez forte pour que les canaux sodiques soient à nouveau activés et qu'il puisse y avoir un potentiel d'action. Normalement, le potentiel d'action ne se propage que dans une seule direction: en effet, chaque portion de fibre nerveuse devient, immédiatement après le passage du PA, très difficilement excitable (période réfractaire. Si toutefois il se produit une excitation dont la propagation se fait en sens inverse [conduction antidromique ; par exemple lors d'une stimulation de la fibre nerveuse par voie externe), celle-ci se terminera au plus tard à la prochaine synapse (fonction de valve).

Le déclenchement permanent de potentiels d'action au niveau des segments de fibre contigus contribue constamment et de manière répétitive à la régénération du signal, mais nécessite cependant un temps relativement long : au niveau des fibres nerveuses conductrices amyéliniques, la vitesse de conduction est de l'ordre de 1 m/s environ. Les fibres nerveuses myélinisées peuvent conduire l'influx beaucoup plus vite (jusqu'à 120 m/s). Comme elles sont, à la manière d'un câble, isolées par une gaine de myéline, la décharge à l'origine de la dépolarisation électrotonique le long de la fibre peut se faire sur une plus longue distance (approx. 1,5 mm). Le potentiel d'action est alors transmis par sauts (conduction saltatoire) d'un étranglement de Ranvier à l'autre. La longueur d'un saut est limitée par le fait que le courant de compensation (1-2 nA) s'atténue rapidement lorsque la distance augmente. Avant qu'il ne devienne sous-liminaire, le PA-signal doit être régénéré au niveau d'un étranglement non isolé : pour cela, un nouveau PA doit être localement déclenché, ce qui nécessite la prise en compte d'un délai supplémentaire (environ 0,1 ms).

Le diamètre axonique exerce également une influence sur la vitesse de conduction : la résistance à la conduction de l'axone est d'autant plus faible que le diamètre de la fibre, donc sa section, est élevé. Le courant électrique de compensation, et par conséquent la dépolarisation des parties avoisinantes, peut de ce fait s'étendre sur une plus grande distance ; ainsi, pour une longueur de fibre donnée, moins de PA néoformés seront nécessaires, ce qui entraîne une augmentation de la vitesse de conduction.

Dans les grosses fibres nerveuses, la capacité membranaire est plus élevée, ce qui diminue la vitesse de conduction de l'influx. Toutefois à cette action s'oppose l'effet positif d'une plus faible résistance longitudinale de la fibre.

Nerf et muscle